EXPO PARIS

Louvre Couture, un enchantement !

La Joconde, le Vénus de Milo, la Victoire de Samothrace, vous croyez connaître le musée du Louvre ? Vous n’avez rien vu ! Courez, volez, marchez pour aller vous éblouir à Louvre Couture, la plus réjouissante, folle et amusante exposition jamais concoctée par les équipes du Musée dans le plus grand secret. Préparez-vous à marcher et à ouvrir tout grand vos yeux pour ce grand jeu de piste à la recherche de la petite et de la grande histoire du Vrai Louvre, entouré par d’étranges et merveilleux serviteurs…

Jean-Charles de Castelbajac (Nicolas Bousser pour le Louvre)

C’est immense, c’est inoui, c’est géant et merveilleux, c’est drôle et émouvant. C’est à la fois une exposition éphémère inspirée et une plongée dans le quotidien le plus intime, l’alliance du luxe et de la beauté, avec une touche de grotesque et d’impertinence. C’est toute la folie, tout le panache, tout le superflu et toute l’inanité de la mode. Voici à quoi ressemble Louvre Couture, cette exposition d’un format inédit qui traverse le Louvre dans son ensemble, sur plus de 9.000 mètres carrés, depuis l’aile Richelieu jusqu’aux derniers cabinets de la cour carrée et qui unit dans le même tourbillon de talent les collections permanentes du départements des Objets d’art à une centaine de silhouettes et d’accessoires de la mode contemporaine de 1961 à nos jours, issues des archives et du patrimoines de 45 grandes maisons de couture française et internationale.

Impossible de tout voir, et de tout raconter. Il faudrait des heures, des jours. Peut-être, sûrement, faut-il venir plusieurs fois. D’abord pour se laisser éblouir par les grands tableaux où les splendeurs des grands couturiers français scintillent entre les aiguières et joyaux royaux. Les commissaires, Olivier Gabet assisté de Marie Brimicombe, l’agence de scénographie Nathalie Crinière, les graphistes d’Anamorphée et les metteurs en lumière de Conception Lumière ont véritablement crée un univers enchanté qui exalte les liens intimes entre la mode et l’art. Il faut connaître ses collections sur le bout des doigts pour dessiner avec autant de finesse les affinités électives entre la mode et l’art, comme dans les premières salles, où les chefs d’oeuvre du Trésor de Saint Denis dialoguent avec les robes signées Dior, Versace, Louis Vuitton, Azzedine Alaïa ou Dolce Gabbana.

« Les musées, en général, le Louvre en particulier, agissent comme des sources d’inspiration infinies, notent les commissaires. Certains créateurs en connaissent les collections en détail et les citent précisément. D’autres s’imprègnent d’une atmosphère, d’une curiosité pour une technique, d’autres encore ont tant collectionné que les oeuvres innervent leurs processus créatifs. » Ainsi, dans la collection Chanel 2019, la dernière présentée de son vivant, Karl Lagerfeld, inspiré par une commode XVIIIE, créait ce moment de pure grâce brodé de plumes d’autruches par Lemarié. De même, en 2002, Donatella Versace empruntait le brocard lampas du cabinet turc du Comte d’Artois pour cette robe-bustier.

Et puis s’amuser dans ce jeu de piste géant à aller pêcher dans les recoins les clins d’oeil facétieux de ces maîtres artisans : Alexander Mc Queen et Christian Louboutin avec la belle collection de terres cuites glaçurées XVIIe de Pierre Revol (1828), ou encore Hermès avec les reliquaires précieux de Saint Denis. « L’exposition joue de ces échos, quelquefois exacts et précis, souvent fantasmés et oniriques, de Byzance à Napoléon III, en passant par la Renaissance et Marie-Antoinette, souligne Olivier Gabet. La mode est encore plus intéressante lorsqu’elle est présentée en relation avec d’autres domaines. Lorsque vous discutez avec un créateur, il vous parle bien sûr de mode, mais aussi d’art, d’artisanat et de photographie. C’est par ce dialogue à mille facettes que la mode se révèle riche, inspirée, et plus que jamais vivante. »

On avance dans les enfilades de salles, on se perd, on demande son chemin, on s’attend à tomber sur un mur, une porte, mais non: « Ca continue ? » Oui, ça continue. On revient sur ses pas, dans l’aile Richelieu. Au passage, on peut goûter aussi le bonheur de traverser le monumental escalier Lefuel nimbé dans la lumière des vitraux conçus en 2.000 par l’artiste François Morellet. Puis réfléchir un peu quand la Fashion week se déroule juste à nos pieds sur le pavé de la Cour Carré et que la présidente du Louvre, Laurence des Cars s’alarme de l’état du musée, des risques d’infiltrations, d’humidité, des besoins d’adaptations permanents aux foules qui se déversent chaque jour pour se prendre en photo devant la Pyramide… Et se dire que, quoi qu’on en dise, qu’on en pense, cette exposition est consacrée à la mode, où les grandes marques s’offrent une vitrine en or, nous raconte de très belle manière l’histoire de nos sociétés où, depuis toujours, le luxe tire le monde, avec ses excès, ses injustices et ses splendeurs.

On gagne ainsi les appartements Napoléon III avec tout leur faste et leurs pompes en pensant qu’ils furent le théâtre d’une violente résistance du ministère des Finances refusant de les quitter pour rejoindre Bercy. On y découvre des merveilles d’art décoratif, comme la bercelonnette du duc Bordeaux livrée aux Tuileries en 1819 par l’ébéniste Félix Rémond, et, tout près du trône de Napoléon 1er, avec ses abeilles en or, une sculpturale robe crée par Alexandre McQueen pour Givenchy en 1997.

Et puis, on revient sur ses pas et on s’enfonce encore plus loin dans le château des Rois de France, dans les vieux appartements de l’aile Sully, dont les petites pièces abritent des merveilles Grand siècle restaurées dans les règles de l’art et à grand prix par de généreux mécènes. On admire la rencontre magique des étoiles et des planètes qui se retrouvent, entre la tenue incandescente imaginée par Daniel Roseberry pour la collection Elsa Schiaparelli en 2022, composée d’une cage spectaculaire de cuir et de métal inscrusté de cabochons et pampilles anciennes, et les vénérables manteaux de l’ordre du Saint-esprit fondé par Henri II en 1578.

Et là dans les courettes oubliées de l’aile Sully, très loin des salles bondées de l’aile Denon, on peut encore imaginer l’entrée tonitruante des Mousquetaires du Roi, ou éprouver comme l’ombre attachante d’une souveraine. Et puis, dans le calme revenu et le parfum ténu des grands parquets cirés, se laisser émouvoir par les échos secrets des vies et des amours qui sont nés ici, et faire grandir nos souvenirs, nos inspirations et nos rêves. Et espérer revenir très bientôt chercher les petites et les grandes merveilles nichées dans ces greniers de notre histoire, encore et encore

Pratique :

Jusqu’au 21 juillet 2025, fermé le mardi.

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