CHANSONS GRANDES FIGURES VOYAGES

Chère Anne Sylvestre, on vous aime tout le temps

Chère Anne Sylvestre

Permettez que je vous écrive en ce premier soir de décembre où vous prenez congé de la terre. Il y a si longtemps que vous ensoleillez ma vie. Il faut au moins que je vous dise merci. La première fois, c’était mon premier 45 tours, tout rond, tout noir, dans le mange-disque et la révélation de cette chanson qui racontait un autre Noël avec ce petit enfant là, Jésus, si nu, si pauvre, dans la paille des bergers…

Dans l’hiver de mes cinq ans, je rêvais d’être cette petite fille qui chantait avec vous, tout comme plus loin dans l’album, je cavalais dans cette maison merveilleuse que vous construisiez au fur et à mesure dans chaque caboche qui vous écoutait.

Vous avez été cette Maman discrète et formidable, toujours disponible, toujours prête à danser, à sauter dans les flaques. J’ai grandi, je suis devenue Maman à mon tour et vous étiez là, toujours. Quand Gabrielle et Madeleine ont appris à marcher, à monter la marche haute. Et aussi le jour où elles tenaient ma main pour aller à la Grande Ecole, et tant d’autres…

Les filles se souviennent, dans notre bonne Clio, alias Titine, des cassettes, un peu poussiéreuses qui tournaient en boucle. Nous avons chanté à tue tête avec vous, fait tourner Martin en bourrique, remonté la toupie de Wapiti, jusqu’au tournis…

Nous avons tutoyé le bonhomme bleu marine, visité les moulins avec Baptiste. Baptiste…

Dans votre voix, il y avait toujours des ruisseaux de rire et de tendresse, des océans de sagesse et des vagues pas toujours innocentes. Car tout autant que mère, vous êtes aussi une femme, indépendante, singulière, féministe, comme vous le chantiez aussi, sur un autre registre. Une sorcière comme les autres. Et vous nous avez appris à le devenir.

J’ai rêvé de vous rencontrer, de vous rendre visite, vous étiez si proche, à chaque instant, sur le bord de nos lèvres, au creux de nos oreilles, à la lisière de nos coeurs. Vous nous avez aidé à tisser nos vies. Vous m’avez appris ce qui compte pour être mère. Plus que des balais, des gâteaux…

Puis j’ai des enfants, lonlère
Puis j’ai des enfants
Que je ne corrige guère
Tâchant, en plus de leur mère,
D’être soleil et grand vent
Mais quand au lit, je les serre
Et qu’ils tombent en rêvant
Mon cœur est grand

Voilà, madame Anne Sylvestre. Vous êtes montée dans votre fusée le dernier jour de novembre. Philomène, Alice, Clémence, Augustin, Martin, la petite Josette, nous toutes, les pommes, les musaraignes et toutes les sorcières, nous sommes un peu perdues ce soir, mais tant que nous vous chanterons, vous ne nous quitterez pas et, grâce à vous, mêmes les feux tricolores auront des allures de friandises. Menthe, abricot, cerise..

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