
Elles chantent comme des princesses ou des mendiantes. Toutes simples, presque nues avec leurs belles robes et ce violoncelle qui joue à lui seul les hommes-orchestre. La chanteuse et violoncelliste brésilienne Dom La Nena et la chanteuse franco-américaine Rosemary Standley ont formé leur duo musical en 2012 tout en poursuivant leurs navigations personnelles. Birds on a wire est un hommage à la chanson de Léonard Cohen et un manifeste de liberté et d’audace. Elles semblent venues de temps immémoriaux, comme les fées ou les sorcières des temps jadis. Quand on l’a écouté une fois, leur album Ramages vous tourne dans la tête comme une ritournelle magique. Le 28 janvier, elles ont fait se lever le théâtre du Châtelet, partout, elles jouent à guichet fermé, mais on peut les retrouver, heureusement quand on veut, sur Arte Concert pour une déambulation magique avec Stefan Eicher au sein du musée du Louvre à Paris.

Quand elles entrent sur la grande scène tout sombre du théâtre du Châtelet, sous l’immense arbre dont les branches se perdent dans le ciel et dont on ne voit que le fût géant, c’est vrai, on a un peu peur. Elle pourraient avoir froid, dans leurs robes de princesses, sur leurs petites chaises. On ne sait pas très bien qui elles sont, des bergères tressant leurs paniers, des vestales, gardiennes de très antiques légendes. Autour d’elle, il y a beaucoup d’espace, le bruit de la pluie, des petits nuages, comme des dragons volants. Et puis, elles commencent à chanter. Leurs voix sont d’une profondeur et d’une légèreté irréelles, un peu étranges, portées par la seule complainte du violoncelle. C’est comme une boisson forte et suave en même temps. Au début, on est troublé, on se dit que s’est trop fort pour nous, et puis, on voudrait que cela ne s’arrête plus jamais. Elles ne sont que deux. Et puis, on comprend qu’il y a tellement de monde avec elles, une rue chauffée au soleil, un village, les femmes d’hier, de jadis, de toujours, les enfants qui chantent et ceux qui meurent, car les enfants qui meurent ne finissent jamais de vivre dans nos cœurs.
On se dit qu’on a déjà entendu ces mélodies, ces paroles, mais on ne les reconnaît jamais totalement. Elles embrassent tous les pays et toutes les langues, empruntent leurs mots à des chanteurs amis et maîtres. Ce ne sont pas des reprises, ce sont des hommages, comme autant de gerbes d’amitié et de respect. On connaît, et en même temps, on découvre. Elles disent des choses secrètes, la souffrance et la force des femmes. Des mots emplis d’ombre et de fureur aussi, comme : « que c’est abominable d’avoir pour ennemi les rires de l’enfance » ou encore « Ne pas parler de poésie en écrasant les fleurs sauvages ».
Au début on applaudit du bout des doigts, on a presque peur de les déranger, et puis, elles nous invitent et tout s’anime. Elles posent des questions toute simples. C’est sûr, on connaît la réponse et on rit, tous ensemble, et l’on chante, et l’on danse, dans ce tourbillon de générosité bienveillante.

Leurs albums son des bijoux, leurs concerts sont des moments étranges, entre invocation et sortilège. A la demande d’Arte Concert, elles ont créé aussi un OVNI poétique qui nous emmène déambuler au musée du Louvre, de la cour Marly, à l’escalier Lefuel en passant par le départements des Antiques et la salle Maritime, avec la complicité de Stephan Eicher, Yann Frisch, Les Chanteurs d’Oiseaux et le Choeur de jeunes de l’Orchestre de Paris. Cela commence devant la Victoire de Samothrace, les statues sont les choeurs, la Vénus de Milo sourit. La camera caresse les tableaux, s’attarde longuement sur une rencontre étonnante, une plongée intime au coeur de La Vierge du chancelier Rolin de Jan van Eyck, joyau de la peinture flamande.

voici les mots de la chanson qui leur a donné leur nom : Like A Bird On A Wire (Comme Un Oiseau Sur Un Fil)
Like a bird on the wire, Comme un oiseau sur un fil
Like a drunk in a midnight choir Comme un ivrogne dans une chorale de minuit
I have tried in my way to be free. J’ai essayé a ma maniere d’être libre
Like a worm on a hook, Comme un asticot au bout d’un hamecon
Like a knight from some old fashioned book Comme un chevalier d’un livre démodé
I have saved all my ribbons for thee. J’ai gardé tous mes rubans pour toi
Et alors, comme par magie, tout entre en résonnance




Pratique
Avec leurs Birds on wire, Rosemary Standley et Dom La Nena sont en tournée en France depuis le mois de septembre, de Toulouse à Calais, de Quimper à Vesoul, et jusqu’au 2 et 3 avril à Chambéry et Villefranche-sur-Saîne. La plupart du temps, c’est complet, mais on peut tenter sa chance…
On peut aussi les voir sur Arte Concert dans le film, filmé les 13 et 14 mai 2024, en compagnie de Stephan Eicher, du magicien Yann Frisch, du duo d’imitateurs de chants d’oiseaux, Les chanteurs d’Oiseaux et du Chœur de jeunes de l’Orchestre de Paris.